Le 1er août 2025, le public de la 59e édition du Festival international de Carthage a assisté à une soirée exceptionnelle placée sous le signe de la diversité et du dialogue musical. Intitulé La Nuit des Chefs, cet événement a réuni cinq chefs d’orchestre venus de différents horizons : le Tunisien Shady Garfi, l’Italien Andrea Tarantino, la Palestinienne Lamar Elyes, l’Algérien Lotfi Saïdi, et le Turc Ahmet Baran, en présence de la ministre des Affaires culturelles, Amina Srarfi.
Chacun des chefs a, tour à tour, dirigé les musiciens de l’Orchestre symphonique tunisien, livrant une interprétation personnelle et sensible dans un programme volontairement éclectique. À travers cette succession de styles et de traditions, chaque maestro a inscrit dans la soirée une œuvre emblématique de sa culture ou fidèle à sa démarche artistique. Deux chanteuses invitées, l’Italienne Goar Faradzhian et la Turque Mine Bitmez, ainsi que les chœurs du Théâtre de l’Opéra de Tunis, ont enrichi cette prestation d’une forte dimension vocale.
La soirée s’est ouverte avec une reprise de « Funk Malouf » de Fawzi Chekili, dirigée par Shady Garfi, accompagné du guitariste tunisien Hedi Fahem. Puis, l’Italie a été mise à l’honneur avec Andrea Tarantino, qui a dirigé l’orchestre aux côtés de Goar Faradzhian, interprétant les classiques napolitains « O sole mio », « Parla più piano », « Con te partirò », et « Funiculì Funiculà ».
Le chef algérien Lotfi Saïdi a ensuite pris la relève, guidant les chœurs dans « Chahlet Laayani », chanson algérienne des années 60 inspirée de « Quizás, quizás, quizás », avant d’enchaîner avec « Ya Rayah », célèbre morceau du patrimoine musical maghrébin.
Puis, la cheffe palestinienne Lamar Elyes a ouvert sa prestation avec « Sama’i Bayati » avant de livrer un moment poignant dédié à la mémoire et à la résistance. « Mawtini », interprétée en présence d’une image de Jérusalem projetée sur écran géant, a précédé « Bahlef bi samaha » (chantée en 1967 par Abdel Halim Hafez) et « Ya chaabi ya oud al-nadd ».
Shady Garfi est ensuite revenu sur scène avec la chanteuse Mongia Sfaxi pour interpréter les airs tunisiens « Tetfatah lachkoun », « Awadteni al-wed », et « Ya zahratan fi khayali » de Farid al-Atrache, plongeant le public dans l’émotion et la nostalgie.
Le maestro turc Ahmet Baran, debout au qanoûn, a captivé l’audience avec un solo avant d’être rejoint par l’orchestre pour une réinterprétation audacieuse du thème de « Pulp Fiction ». Il a poursuivi avec « Taamoluet », un morceau turc entraînant, suivi d’une version revisitée de la Symphonie n°40 de Mozart, fusionnant tradition classique et énergie orientale. Sa prestation a culminé avec la chanteuse Mine Bitmez, qui a interprété plusieurs titres en turc, touchant un public conquis.
La soirée s’est conclue sur « Lila », dirigé par Shady Garfi et interprété par les chœurs, en guise d’ultime hommage à cette rencontre musicale unique.
En conjuguant fidélité aux œuvres classiques et audace créative, les musiciens de l’Orchestre symphonique tunisien ont brillamment relevé le défi d’unir cinq visions artistiques singulières. Ce dialogue entre cultures, porté par des chefs venus d’ailleurs, a célébré la richesse de l’expression symphonique et l’universalité d’une musique sans frontières.